Après la naissance et la période nouveau né, qui est intense en émotions et découvertes, vient le moment de l’indépendance. Une fois la marche acquise, l’enfant veut de plus en plus faire seul, et développe son caractère.
On parle beaucoup du fameux « terrible two » qu’est-ce que c’est vraiment ? Est-ce que tous les enfants passent par cette phase ?
Isabelle Filliozat : C’est l’époque entre 18 mois et deux ans, où l’enfant cherchant à décider par lui-même, s’oppose aux ordres de ses parents. Ce n’est pas forcément une période terrible, ce n’est une période difficile que lorsque les parents insistent pour imposer leur pouvoir et continuent de donner des ordres, d’utiliser le mode impératif au lieu de poser des questions, de proposer des choix, bref de permettre à l’enfant d’utiliser son cerveau préfrontal pour décider par lui-même.
Que faire quand un parent a le sentiment que rien ne peut marcher, que peu importe la façon dont il explique à son enfant qu’il n’est pas d’accord, ça ne change rien ? Quelles sont les alternatives à la punition, au coin ?
IF : Que faire ? Stopper cette direction erronée. Quand les parents bloquent un enfant dans le stress, souvent ils tentent toutes sortes de choses, mais toutes dans le même sens, en cherchant à imposer à l’enfant une contrainte. Plus ils font cela, plus l’enfant est stressé. Et donc se bloque, crise ou fuit.
Au lieu de chercher des alternatives au coin ou à la punition, il serait utile de chercher des alternatives à notre façon d’entrer en relation avec nos enfants. Tous les humains résistent à la contrainte, un enfant est un humain. Lorsqu’on lui impose quelque chose, il se sent en danger, et son amygdale secrète alors des hormones de stress. Au lieu de tenter « d’expliquer » que nous ne sommes pas d’accord, ce qui ne peut guider un enfant, surtout de moins de trois ans, vers un autre comportement. Pourquoi ne pas plutôt guider avec tendresse et enseigner à l’enfant le comportement que nous désirons lui voir emprunter ?
Exemple concret : comment gérer une crise dans un magasin, par exemple si l’enfant veut quelque chose qui n’est pas sur la liste, ou s’il préfère nous faire courir dans tout le magasin ?
IF : Une crise dans un magasin est causée par le stress, par une surcharge de stimulations. Il est donc utile de prendre l’enfant tendrement dans les bras pour que son cerveau déclenche la sécrétion d’ocytocine qui calme le stress. Un enfant ne « préfère » pas nous faire courir. S’il nous échappe chaque fois que nous tentons de l’attraper, ce peut être parce que son amygdale déclenche la réaction de fuite. Nous calmer, le regarder avec tendresse, parler d’une voix douce nous permettra de récupérer l’enfant. Nous avons appris à regarder les enfants comme cherchant à nous manipuler, à nous faire marcher. Il est important de réaliser qu’un enfant de moins de trois ans n’en a pas la capacité intellectuelle ! Ses réactions sont des réactions biologiques.
Mon enfant n’est pas câlin, me rejette, me griffe, ne veut pas partir de la crèche/nounou : est-ce qu’il ne m’aime plus ? Est-ce que je peux lui montrer que je suis triste ?
IF : Non, lui montrer que nous sommes triste est tout à fait inapproprié. Nous sommes le parent ! Nous n’allons pas nous mettre en concurrence avec l’enfant. Dire qu’il n’est pas câlin est un jugement. Cherchons pour quelle raison l’enfant peut réagir en rejetant sa maman. Elle l’a laissé chez la nounou toute la journée… Elle lui a manqué. Quand elle revient, cela le confronte à la souffrance, au stress ressenti lors de l’absence. L’enfant rejette la souffrance, pas sa mère ! Il n’est pas question de faire de la compétition avec notre enfant en éprouvant de la tristesse face à son attitude, mais de sourire, rire chaleureusement et retisser la relation avec l’enfant.
Comment jouer avec un enfant qui ne reste pas en place ou concentré ? Comment s’amuser avec son enfant et recréer de la complicité? Quelles alternatives à la télé ?
IF : Lui permettre de sauter et courir ! Sortir avec lui et courir ensemble, jouer au ballon, l’emmener grimper aux arbres. Grimper aux arbres pendant vingt minutes augmente notablement les capacités de concentration et de mémoire. Hormis ces jeux d’extérieur et toniques, pour recréer de la complicité, une bonne bagarre sur le lit, c’est super chouette !
Quels sont les bienfaits de la « parentalité positive » par rapport à l’éducation traditionnelle (avec fessée, punitions, coin…) ?
IF : C’est tellement plus harmonieux à la maison ! Personne n’aime les conflits à répétition, les jeux de pouvoir, les bagarres sans fin. Nous n’avons pas fait des enfants pour cela. Si nous sommes enfermés dans les fessées et punitions, c’est seulement que nous n’avons pas d’autre idée, nous ne savons pas comment faire autrement. C’est pour cela que je fais traduire des ouvrages américains, ces derniers sont pratico-pratiques, ils nous apportent des outils concrets, comment je peux faire pour ceci ou cela. La parentalité positive, c’est fournir des ressources aux enfants pour qu’ils se comportent comme nous le désirons, plutôt que de leur donner des limites qu’ils ne peuvent respecter de part l’immaturité de leur cerveau.
Source : beautifulmum